La levée de l'embargo de la part de la Russie permettra-t-elle d'accroître les flux de marchandises sur la Nouvelle route de la soie et d'équilibrer le transport ferroviaire sur la direction Europe-Chine? Cela dépend d'un certain nombre de facteurs.
En août 2014, la Russie a interdit les importations de produits alimentaires en provenance de plusieurs pays. Parmi eux figurent l'Union européenne, les États-Unis, l'Albanie, l'Australie, le Monténégro, le Liechtenstein, l'Irlande, la Norvège et l'Ukraine. Selon le portail polonais d'informations Rzeczpospolita.pl., le Kremlin a prolongé d'une année la durée de l'embargo sur les importations de produits alimentaires en provenance des pays occidentaux. Que se passera-t-il lorsque les interdictions viendront à expirer? Les conséquences d'une éventuelle levée de l'embargo et son impact sur le transport ferroviaire sont commentés par le chef du département des transports ferroviaires européens d’AsstrA Associated Traffic AG, Eva Trohimyuk.
Si la Russie levait l'embargo sur le transit des produits alimentaires, cela augmenterait-il les flux de marchandises sur la Nouvelle route de la soie?
Je pense que oui. Le chemin de fer reste une alternative au transport aérien rapide, mais coûteux et plus abordable en termes de prix que le transport maritime, plus lent.
Les Chinois sont intéressés par l'importation de produits alimentaires en provenance d'Europe, car les produits européens sont populaires dans le Royaume du Milieu. Ce sont des produits "de luxe". Le marché local devient ouvert aux importations à la grande joie des entreprises de l'UE cherchant à entrer sur le marché chinois. Le consommateur chinois est le représentant d'une classe moyenne en croissance constante (ce chiffre atteindra bientôt le demi-milliard). Les habitants préfèrent acheter des produits importés, convaincus de leur sécurité alimentaire. Les fabricants locaux perdent dans cette lutte. Les Chinois choisissent des produits sains et écologiques qu’ils cherchent à obtenir frais et dans des délais courts.
Pendant plusieurs années, après l’introduction des interdictions sur le marché chinois, de nouveaux acteurs sont apparus. Il s’agit, entre autres, du Belarus, qui exporte vers la Chine des produits laitiers (lait en poudre et entier, crème glacée, fromages), de la volaille et du bœuf. La Russie est également l'un des principaux partenaires de la Chine. Les exportations alimentaires entre les deux pays augmentent chaque année.
Les exportations alimentaires européennes équilibreront-elles le trafic ferroviaire entre l'Europe et la Chine?
Il est difficile de répondre clairement à cette question. Il y a des chances. Mais à la lumière des événements récents (la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine), l’équilibre du trafic ferroviaire dans cette direction est reporté.
Certains signes indiquent que les partenaires chinois recherchent de nouveaux moyens d'entrer en Europe, en contournant la Pologne. Il convient de rappeler que de telles fluctuations sur la scène politique se répercutent plus rapidement dans le secteur des transports. Les règles de l'UE interdisent l'importation de certains produits chinois. La même interdiction fonctionne également dans le sens opposé.
Les connexions de conteneurs ferroviaires sont subventionnées par le gouvernement chinois, mais la Chine envisage à terme de réduire les subventions. Il est difficile de prédire les conséquences. Il est probable que les pays de l'UE intéressés à entrer sur le marché chinois paieront un supplément pour le transport dans la direction opposée. C'est ce qu’a fait la Russie durant plusieurs années. Pour soutenir les exportateurs de produits alimentaires, le gouvernement russe compensait la moitié du coût du transport ferroviaire en Chine.
En second lieu, on ignore comment se développera l’économie du pays. Aujourd'hui, la Chine est le plus gros importateur de produits alimentaires. Mais cela ne signifie pas que dans quelques années, l'Empire céleste ne deviendra pas un pays qui nourrira l'Europe. La Chine investit activement dans le secteur agricole, achète et développe des millions d'hectares de terres en Afrique.
Espérons qu'après la levée de l'embargo russe, les consommateurs chinois continueront de s'intéresser aux produits alimentaires européens. Le nombre de trains de retour vers la Chine avec des produits alimentaires et agricoles européens va augmenter, ce qui affectera les coûts de transport.
Combien de temps faudra-t-il pour équilibrer les flux du trafic ferroviaire sur la direction Europe-Chine?
Pendant plusieurs années, le volume de livraisons de marchandises par chemin de fer en provenance d’Europe à destination de la Chine augmente. En ce qui concerne les produits alimentaires, les relations commerciales sont toujours bloquées par l'embargo russe. Dans cette situation, le transport maritime reste plus attrayant. On peut faire des suppositions, mais, comme déjà mentionné, la situation géopolitique est encore instable. À commencer par l'embargo russe, ainsi que la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis, ces facteurs affectent le transport ferroviaire.